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TRIBUNE. Marcel Kuntz, directeur de recherche au CNRS, revient sur l'essor de plusieurs mouvances qui ont l'apparence de la science mais pas sa rigueur.
Le professeur Stuart s’inquiète de ces phénomènes où la « junk science rencontre Internet » : « Retrouver des formes dans les constellations, c’est un peu le test de Rorschach », explique-t-il, faisant référence à ce test psychologique où l’on demande aux sujets d’interpréter librement des formes à partir de taches symétriques.
« Il y a des sites mayas partout, et des étoiles partout également. La forme carrée est en effet l’œuvre de l’homme, mais c’est un vieux champ de maïs (…). »
Il est fort regrettable qu’un lecteur peu informé puisse se laisser impressionner et croire avoir été initié aux vies de grands savants. Il faut rappeler que ces livres colportent nombre d’erreurs et de choses fausses ! Il est désolant d’imaginer que, vu leur succès, des générations d’enfants, d’adolescents (et d’adultes...) puissent avoir cette image déformée de la science.
Le 9 septembre dernier est décédé José Luis Jordan Peña, un madrilène né en 1931 à Alicante et technicien supérieur en télécommunications. Ce nom ne vous dit probablement pas grand chose, et pourtant, cet espagnol est l’auteur présumé d’une des supercheries les plus sophistiquées de ces cinquante dernières années : « l’affaire Ummo ». De quoi s’agit-il ? De soucoupes volantes, d’extra-terrestres humanoïdes à l’intelligence supérieure, et de mystérieuses lettres adressées aux plus grands esprits terriens reconnus par nos visiteurs célestes. Tout un programme. Mais ne nous y trompons pas, si la supercherie peut sembler fumeuse (tout comme son nom, inspiré du mot « humo » signifiant fumée en espagnol), la complexité de sa mise en œuvre en fait certainement une des meilleures histoires sceptiques. Il fallait donc bien rendre un dernier hommage complice au « père » des Ummites…
Cible facile des critiques populaires, les météorologues ne sont évoqués que lorsqu'ils se trompent (rarement) et jamais quand ils voient juste (souvent) : on ne se souvient que des trains en retard, jamais des trains à l'heure. Les Wetterschmöcker, les "renifleurs de météo", bénéficient quant à eux du biais inverse (celui-là même qui permet aux voyants et aux homéopathes de continuer à prospérer): les gens ne se souviennent que leurs prédictions réussies et jamais de leurs échecs. Qu'on les présente comme des personnages folkloriques traditionnels, passe encore. Mais lorsqu'on tente de leur attribuer un taux de réussite équivalent à celui des météorologues professionnels, une limite est franchie et il devient évident que le public est trompé dans les faits qui lui sont présentés.
Le centre d’analyse stratégique a publié en octobre 2012 une note1 intitulée : « Quelle réponse des pouvoirs publics à l’engouement pour les médecines non conventionnelles2 ? » Le Centre d’analyse stratégique est une institution d’expertise et d’aide à la décision placée auprès du premier ministre. Il a pour mission d’éclairer le Gouvernement dans la définition et la mise en œuvre de ses orientations stratégiques en matière économique, sociale, environnementale ou technologique. Il préfigure, à la demande du premier ministre, les principales réformes gouvernementales. C’est bien pourquoi il semble nécessaire d’examiner avec la plus grande attention les propositions qu’il vient de faire dans un domaine de plus en plus gagné par l’irrationnel.
Vous avez peut-être été déconcertés par la largeur des rayons ésotériques dans les librairies, mais vous êtes-vous déjà demandé en quelle proportion les livres pseudoscientifiques et les livres scientifiques y étaient vendus ?
Mais qu’entend-on en définitive par les différents termes utilisés pour désigner ces pratiques thérapeutiques : médecines douces, complémentaires, alternatives, parallèles, holistiques... ?
Michel Rouzé écrivait dans un article « Pourquoi nous nous intéressons (aussi) aux pseudo-sciences » : « Reconnaissons à la magnétothérapie le mérite de l’innocuité, si ce n’est pour les portefeuilles. » [7] En effet, la plupart des gadgets d’aujourd’hui ne produisent aucun champ magnétique significatif qui puisse pénétrer la peau, mais la publicité qui les vante endort les esprits pour mieux vider la caisse.
L’étude, menée à 10 ans d’intervalle, soit en 2001 et en 2011, démontre que l’espace attribué aux pseudosciences par rapport aux sciences dans les librairies généralistes à grande surface est plutôt demeuré stable. En effet, la proportion moyenne d’espace attribué à ces ouvrages comparativement aux livres scientifiques est passée de 89,1% en 2001 à 86,5% en 2011.
Pour arriver à ce constat, le chercheur et ses collègues sont allés comparer l’espace (en cm) réservé aux livres consacrés à la vulgarisation scientifique et au fonctionnement de la science ou de son histoire à celui occupé par les livres qui traitent d’ésotérisme, d’astrologie, de paranormal ou encore de psychologie populaire, dans diverses librairies à travers le Québec. Des résultats qui se traduisent comme suit: si tous les ouvrages mesuraient la même d’épaisseur, sur 10 livres, 9 seraient consacrés aux pseudosciences alors qu’un seul serait dédié à la science. Sans compter qu’il arrive souvent que les deux genres se retrouvent dans la même rangée, ce qui peut facilement mener à une confusion chez les lecteurs.